Sardaigne du Sud

La plage des Piscinas et la rivière Rouge

À l’ouest de la Sardaigne, là où la terre semble vouloir plonger dans la mer sans plus de résistance, un trésor naturel s’étend entre ciel et maquis : la plage des Piscinas.

Sur la route de Piscinas : entre ruines industrielles et merveilles naturelles

Pour atteindre la plage des Piscinas, il ne suffit pas de suivre une simple route. Il faut traverser un paysage de mémoire, un couloir où les ruines racontent l’histoire d’une Sardaigne laborieuse et oubliée. Le voyage commence bien avant le sable, dans la vallée minière d’Ingurtosu.

En descendant depuis Montevecchio ou Arbus, la route nous fait entrer dans le Villaggio Minerario di Ingurtosu, un ancien village de mineurs niché dans les montagnes. L’endroit semble figé dans le temps. On y devine encore l’école, les maisons des ouvriers, l’imposant bâtiment administratif du directeur, et les rails rouillés qui disparaissent dans la végétation. Un silence émouvant y règne, comme si le village, vidé de ses habitants, retenait encore leur souffle.

Plus loin, on atteint le Pozzo Turbina, l’un des puits d’extraction emblématiques de la région. Ici, les structures métalliques surgissent au milieu du maquis, vestiges d’une époque où l’on extrayait sans relâche le plomb, le zinc, et l’argent. C’est un décor à la fois brut et poétique, où la nature commence doucement à avaler les cicatrices de l’industrie.

Et puis soudain, nichée au fond de la vallée, apparaît la Miniera di Naracauli, également appelée Laveria Brassey. Cette ancienne laverie de minerai, construite en terrasses sur le flanc de la montagne, est un spectacle à elle seule. Sa structure imposante, ses arches de pierre, ses couloirs effondrés et ses escaliers envahis par les plantes offrent un tableau grandiose. C’est un lieu de mémoire, mais aussi un point d’ancrage esthétique, où le travail de l’homme et l’érosion du temps créent un étrange équilibre.

Après avoir franchi ces témoins du passé, la route devient une piste de terre. Pendant cinq à six kilomètres, elle traverse un paysage aride, sauvage, entre maquis et collines. Le chemin est cahoteux, parfois rude, mais chaque tournant rapproche du but : la plage des Piscinas, joyau naturel de la Sardaigne.

Là, le spectacle est saisissant. De gigantesques dunes, parmi les plus hautes d’Europe, se dressent face à la mer. Le vent les modèle sans cesse, leur donnant des courbes douces, presque féminines. Le sable est chaud, doré, et le silence n’est troublé que par le ressac et le cri d’un goéland. La mer, elle, oscille entre le turquoise et l’azur, selon l’humeur du ciel.

Non loin de là coule un autre miracle : le Rio Piscinas, aussi connu sous le nom de rivière Rouge. Ce ruisseau, né dans les hauteurs de Montevecchio, est alimenté par les eaux souterraines qui s’écoulent encore depuis les anciens tunnels de mines abandonnées. C’est ce qui lui donne cette teinte rouge cuivrée si particulière, presque irréelle. Il serpente à travers le paysage, franchissant des gués célèbres sur la SP4, et rejoint la mer en silence.