
Il Maneggio discothèque abandonnée
Il y a des lieux qui ne s’oublient pas, même quand le temps les ronge.
À Romagnano Sesia, Il Maneggio fut bien plus qu’une discothèque : c’était un monde à part, une bulle de lumière et de musique où toute une génération est venue danser jusqu’à l’aube. Aujourd’hui, les murs fissurés et les vitres brisées n’ont pas effacé la mémoire des nuits endiablées. Entrer ici, c’est franchir un seuil entre passé et présent, fête et silence.
Inauguré en 1989, Il Maneggio a marqué pendant plus de quinze ans la vie nocturne de la région. D’abord simple club de danse, il s’est transformé au fil des ans en véritable complexe de fête, atteignant son apogée dans les années 90 et au début des années 2000. À son apogée, le site comptait trois salles intérieures – dont une spectaculaire salle octogonale en bois – et une piste d’été aménagée au-dessus d’un bassin artificiel, donnant aux danseurs l’illusion grisante de flotter sur l’eau.
Le lieu avait quelque chose de démesuré, presque irréel : un restaurant avec vue plongeante sur la piste principale, un Maroccain Lounge à l’ambiance méditerranéenne, un Zanzibar au décor africain, des allées pavées de dalles translucides qui semblaient s’illuminer sous les pas… Tout ici respirait l’exubérance et le goût de l’évasion.
Aujourd’hui, la fête s’est tue. Les salles éventrées, les fresques effacées et les vitres brisées n’ont pas fait disparaître l’âme du lieu. Au contraire : dans le silence poussiéreux, on croirait encore entendre le martèlement sourd des basses, les éclats de rire, les corps serrés qui s’animent sous les flashs stroboscopiques. Il plane ici un charme étrange, presque post-apocalyptique, comme si tout pouvait renaître d’un instant à l’autre.
Le début des années 2000 a marqué le déclin. La fréquentation s’essouffle, les contrôles routiers dissuadent les fêtards, et peu à peu l’énergie se disperse. 2007 signe la dernière nuit de fête. Quelques mois plus tard, en janvier 2008, un incendie met définitivement fin à l’histoire.
Pourtant, même en ruine, Il Maneggio reste un lieu habité par ses fantômes. Il suffit d’un pas dans la pénombre, d’un souffle d’air dans une vitre cassée, d’un regard posé sur une estrade branlante, pour sentir que le passé n’est jamais très loin.
Aujourd’hui, il ne reste que des murs fissurés, des estrades branlantes et des couloirs où la végétation s’invite. Mais derrière chaque tag, chaque vitre brisée, chaque poutre calcinée, l’histoire de Il Maneggio continue de résonner.
Les photos qui suivent ne cherchent pas à enjoliver : elles montrent le lieu tel qu’il est, brut, fragile, traversé par le temps. Des images où l’on devine encore l’éclat des nuits passées, comme des éclats de lumière dans les décombres.
