Sant’Antioco
Après trois jours à Iglesias, où nous avons exploré les vestiges poignants du passé minier à Monteponi, déambulé entre les maisons abandonnées du Village minier e Normann, du Village minier d’Asproni, du village minier de Malacalzetta et grimpé jusqu’aux anciennes galeries de Monte Onixeddu, nous avons pris la route vers l’ouest. La mer nous appelait. Nous avons quitté les terres rouges de la mine pour gagner le pont qui relie la Sardaigne à Sant’Antioco.
Là, une première visite nous a mené sous terre, dans le village souterrain de Sant’Antioco, où les catacombes paléochrétiennes croisent les hypogées puniques, dans un écheveau de galeries chargées d’histoire. Puis nous avons trouvé un hébergement paisible sur l’île, entre mer et maquis, et commencé à explorer cet endroit fascinant, à la fois aride et fertile, mystique et ancré.
La ville de Sant’Antioco : sous la pierre, les époques
C’est dans la ville principale de l’île que bat le cœur le plus ancien. Nous avons visité la basilique Sant’Antioco Martire, nécropole transformée en lieu de culte, où reposent les reliques du saint africain venu ici au IVe siècle. Juste en dessous, les catacombes creusées dans le tuf se déroulent comme une mémoire souterraine.
Le musée archéologique Ferruccio Barreca retrace l’histoire de l’île, des Phéniciens aux Romains, en passant par les Carthaginois. À quelques pas, le Tophet, cimetière à ciel ouvert pour enfants sacrifiés, nous a laissé un frisson de silence.
Le port et les savoir-faire
Sur les quais du port, les barques peintes tanguent doucement. Les pêcheurs ravaudent leurs filets, et les femmes brodent des napperons comme leurs mères avant elles. Dans quelques ateliers discrets, on façonne encore le corail rouge et la dentelle sarde.
Les plages de l’île : solitude et sel
Plus au sud, les plages de Maladroxia et de Coaquaddus s’étendent en courbes douces. Le sable y est clair, l’eau d’une transparence folle. Nous avons nagé à Cala Sapone, sauté depuis les rochers de Turri, puis atteint Capo Sperone, tout au bout de l’île, où le vent fouettait nos visages et où le regard portait jusqu’aux confins d’un autre continent.
Du côté ouest, Is Praneddas et son fameux « Arco dei Baci » forment une arche naturelle ciselée par le vent et l’eau. On y accède par des sentiers discrets, et là encore, nous étions seuls.
Les collines intérieures et les vestiges anciens
L’intérieur de l’île révèle un tout autre visage : collines de basalte, champs de figuiers, oliviers noueux. Près du hameau de Cussorgia, nous avons croisé des vignes de Carignano, avant de tomber sur le nuraghe Su Niu de su Crobu, témoin muet de la civilisation nuragique.
Partout, des tombes des géants, des nécropoles, des murets de pierre sèche, comme autant de marques laissées par les anciens.
Une île à savourer
Et puis il y a eu les goûts. Le thon rouge, pêché localement. La bottarga, ce caviar méditerranéen. Les oursins, dévorés sur le pouce. Et les cassatinas, petits raviolis sucrés à la ricotta. Chaque soir, un vin de Carignano accompagnait nos repas simples. Chaque matin, la lumière baignait différemment les pierres de l’île.
Sant’Antioco est bien plus qu’une île. C’est une traversée du temps, un morceau de mémoire méditerranéenne que le vent, la mer et le soleil racontent mieux que les livres.
