Corse 2001

Aout en Corse

Première fois que je rends visite à ma famille en plein été corse. Erreur de débutant. La chaleur est si intense qu’au bout de deux minutes dehors, même l’ombre semblait brûler. Je me souviens avoir posé une canette de soda sur la table du jardin : le temps d’aller chercher un verre, elle était déjà tiède.

Nous sommes partis en camping-car pour une petite semaine avec Myriam, mon ex-beau-frère Pierre, sa femme Marie-Hélène, leur fils Kévin, et Romain, mon fils.
Romain est un habitué de la Corse : chaque année, il y passe ses vacances d’été chez ma sœur, sa marraine.

Départ en camping-car depuis Lézignan.
Première étape : l’embarquement à Marseille sur le ferry Le Napoléon.

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Cette première soirée sera folklorique. Première anecdote : dans le jacuzzi du bateau, Romain et Kévin se sont lancés dans un concours d’apnée. Résultat ? Plus de huit minutes sous l’eau ! On n’en revenait pas… avant de comprendre qu’ils respiraient en douce avec les bulles du jacuzzi. Les petits malins !

La soirée avec Pierre, elle, fut bien différente : arrosée à la bière et au whisky, elle nous a tenus une bonne partie de la nuit.


Le lendemain, la route Ajaccio–Lecci a été interminable : mal de tête carabiné, Doliprane obligatoire, et chaleur accablante… Le trajet a semblé durer une éternité.

Comme si ça ne suffisait pas, un petit ennui mécanique est venu pimenter l’aventure : le roulement de cardan droit donnait de sérieux signes de faiblesse. Résultat, près de cinq heures de route pour à peine 150 km.(+ Les pauses)

Il est vrai que nous avons multiplié les arrêts.


D’abord, Sartène, surnommée « la plus corse des villes corses » par Mérimée, nous accueille avec ses vieilles maisons de granit serrées sur le promontoire. Même si nous n’y faisons qu’une courte halte, l’atmosphère médiévale de ses ruelles vaut à elle seule le détour.

Depuis cette première visite, je suis souvent revenu à Sartène, mais je n’ai publié un article qu’en mai 2016 : le découvrir.


Un peu plus loin, nouveau stop sur un parking panoramique offrant une vue spectaculaire sur le Lion de Roccapina. Ce rocher emblématique, façonné par le vent et l’érosion, ressemble à un lion couché veillant sur la baie turquoise en contrebas. Selon la légende, il s’agirait d’un seigneur maudit, transformé en pierre pour avoir trop aimé la guerre et la conquête.

En dessous, la plage de Roccapina, avec son sable blanc immaculé, nous faisait déjà rêver… mais impossible de s’attarder, la route était encore longue. Pour en savoir plus sur ce fascinant rocher : lire l’article sur le Lion de Roccapina.


Dernière pause à Bonifacio, mais très rapide : trop de monde, trop de circulation. Nous avons juste eu le temps d’apercevoir ses impressionnantes falaises blanches plongeant dans la mer et sa citadelle accrochée au rocher, avant de reprendre la route vers Lecci.

PS : La dernière fois que j’ai actualisé mes souvenirs de Bonifacio, c’était en novembre 2024 et la magie était toujours intacte, découvrez là


Le camping-car, malgré ses caprices mécaniques, finit par nous mener à bon port. En fin d’après-midi, nous arrivons enfin à Lecci, lessivés par la route, la chaleur et les arrêts successifs.

Ma sœur nous attendait avec l’impatience des retrouvailles estivales. Pour Romain, c’était comme rentrer à la maison :depuis 3 ans chaque été il retrouvait sa marraine et l’ambiance corse qu’il connaissait déjà par cœur. Pour moi, en revanche, c’était une première immersion estivale… et je découvrais vite que le mois d’août en Corse n’est pas pour les âmes sensibles. Le soleil ne pardonne pas, la poussière colle à la peau, et la moindre tâche – même descendre du camping-car – devenait une épreuve.

Mais le soir, tout s’effaçait autour d’une grande table. Les conversations s’entrecroisaient, les assiettes se remplissaient de charcuterie, de fromages corses et de tomates gorgées de soleil. Le rosé bien frais coulait à flot, et les macagne commençaient déjà à fuser. On se lançait des piques gentilles, en riant fort, comme pour sceller les retrouvailles.

Romain et Kévin, infatigables, reprenaient leurs jeux, cette fois en courant autour du jardin, pendant que nous autres essayions tant bien que mal de récupérer de cette journée. Et c’est Paul Noël, le mari de ma sœur, qui a ressorti une bouteille comme si de rien n’était, prêt à prolonger la soirée jusque tard dans la nuit. Moi, je n’étais pas encore remis de mon mal de crâne et je me contentais de sourire, heureux malgré la fatigue d’être enfin arrivé au cœur de cette île que j’allais peu à peu apprendre à aimer.



Une semaine à Lecci – Été 2001

Dès les premiers jours, le camping-car donnait des signes de faiblesse : ce fameux roulement de cardan menaçait de lâcher. La pièce fut commandée, mais il fallait attendre sa livraison. En attendant, pas question de rester enfermés : on a improvisé.

Les matinées se passaient à la plage de Saint-Cyprien, devenue notre point de ralliement. L’eau turquoise et peu profonde permettait aux enfants de s’éclater sans limite : concours de plongeons, jeux de ballon, batailles de sable. Nous, les grands, oscillions entre baignade et refuge sous la paillote, un verre frais à la main.

Nous avons aussi profité de ces journées pour découvrir les alentours. Une escapade à Bonifacio nous a laissés bouche bée devant ses falaises blanches plongeant dans la mer, sa citadelle perchée et ses ruelles animées, même si la foule de touristes nous a vite rappelé que nous étions en plein mois d’août. Nous avons également goûté au paradis des cartes postales en foulant le sable blanc de Palombaggia et de Santa Giulia, où l’eau translucide donnait l’impression de nager dans un lagon tropical.

Les après-midis plus tranquilles se passaient à flâner du côté de Porto-Vecchio, bondée mais animée, ou simplement dans les villages voisins. Et le soir, retour aux longues tablées à Lecci : charcuterie, rosé bien frais, discussions à rallonge et macagna à n’en plus finir. Même avec la chaleur accablante, l’ambiance restait joyeuse.

Puis arriva le quatrième jour : la pièce enfin livrée, Pierre et moi nous sommes attaqués au camping-car. Étendus sous la carcasse, les mains pleines de cambouis et le soleil de plomb au-dessus de nous, nous avons passé l’après-midi à bricoler. Les enfants, curieux, nous tournaient autour en lançant des piques : « Vous êtes sûrs de savoir ce que vous faites ? » Après quelques jurons, beaucoup de sueur et quelques éclats de rire, la réparation fut terminée. Quand le moteur a redémarré sans grincement, nous avons levé les bras comme des champions. Petite victoire, mais énorme soulagement : l’aventure pouvait continuer en toute sérénité.


Le reste de la semaine a pu se dérouler plus sereinement. La plage de Saint-Cyprien devint notre quartier général : eau turquoise, sable brûlant et concours de plongeons pour les enfants, plongée, jet ski pour les grands.

Un soir, direction un restaurant à Porto-Vecchio. Les terrasses bondées, les odeurs de grillades, la vieille ville vibrante… Nous nous sommes régalés de figatellu et de fromages corses au goût puissant, pendant que les enfants finissaient la soirée les moustaches pleines de glace artisanale.

Il y eut aussi la fameuse soirée en discothèque en Cala Rossa. Musique à fond, cocktails sucrés et ambiance surchauffée. Paul Noël connaissait du monde, bien sûr, et nous étions accueillis comme des habitués. La nuit fut longue, trop longue… et le retour s’est fait dans un silence religieux, chacun noyé dans sa fatigue.

Les soirées à Lecci, elles, avaient un charme bien différent. Autour de la table familiale, on refaisait le monde entre une assiette de charcuterie, bière locale « La Pietra », du rosé bien frais et des éclats de rire.

Une escapade à Zonza nous offrit un souffle d’air plus frais, avec ses montagnes qui semblaient nous protéger du soleil.

Découvrez l’article sur le village de Zonza

Quant à Bonifacio, toujours trop pleine de monde, nous n’y fîmes qu’un passage éclair pour admirer ses falaises blanches et sa citadelle accrochée au rocher.

Et puis il y a eu cette soirée en au Pavillon Bleu au bord de l’eau, inoubliable. Une guitare passa de main en main, des chants corses s’élevèrent dans la nuit, et le parfum du maquis se mêlait à la brise marine. Ce soir-là, j’ai compris pourquoi Romain revenait chaque année, et pourquoi ma sœur avait choisi de poser ses valises ici.

Ce nouvel été à Lecci restera gravé comme un mélange de galères mécaniques, de chaleur accablante, de repas interminables et de bonheurs simples. La Corse, déjà, s’imposait à moi comme une terre rude mais généreuse, où chaque journée se transforme en souvenir.


Le départ – Août 2001

La semaine passa vite, trop vite. Une fois le camping-car réparé, les journées s’étaient enchaînées dans une routine délicieuse : la plage, les repas en famille, les soirées à rire trop fort, les enfants infatigables et nous, un peu moins résistants.

Chaque sortie devenait une aventure : se garer à Porto-Vecchio dans le flot de touristes, trouver une table libre en terrasse, résister au soleil en attendant l’ombre. Mais tout avait un goût particulier ici : les grillades corses, les fromages au parfum sauvage, les bieres qui rafraîchissaient autant qu’elles assommaient. Même la fatigue avait quelque chose de joyeux.

Le dernier soir, à Lecci, la table était encore plus garnie que d’habitude. Ma sœur avait préparé un repas digne d’un banquet, Paul Noël avait ressorti une bouteille de myrte « pour la route », et les enfants couraient dans le jardin en profitant de chaque instant.

Puis vint l’heure de repartir. Le camping-car, vaillant après sa réparation maison, nous ramena jusqu’à Propriano. L’embarquement se fit dans une drôle d’ambiance : un mélange de fatigue, d’impatience de rentrer… et déjà une pointe de nostalgie.

En quittant le port, je regardais l’île s’éloigner lentement. J’avais découvert une Corse rude et solaire, fatigante et enivrante à la fois. J’avais surtout compris pourquoi Romain voulait y revenir chaque année : ici, tout est plus fort — le soleil, la mer, les repas, les rires, même les disputes mécaniques autour d’un cardan de camping-car.

Cet été corse restera gravé comme une initiation, une plongée dans l’été insulaire, avec ses excès, ses galères et ses bonheurs simples. Une semaine qui, malgré la chaleur accablante et les migraines au rosé, m’a donné envie de revenir… et d’aimer cette île à la fois fière et accueillante.