Antoni Gaudi,  Quartier El Raval

01) Palau Güell Barcelone – Antoni Gaudi

C’est parti pour une visite extraordinaire. Le Palau Güell, ou Palais Güell en français, est une œuvre saisissante, à la fois discrète et monumentale, nichée au cœur du quartier populaire du Raval, à deux pas des Ramblas. C’est ici que le jeune Antoni Gaudí, à la fin des années 1880, va poser les bases de son langage architectural unique, grâce à la confiance d’un homme : Eusebi Güell, industriel visionnaire, esthète et mécène.


Exploration approfondie du Palais Güell : Un Voyage au Cœur de l’Art et de l’Architecture Moderniste à Barcelone

Niché dans le quartier historique de Barcelone, le Palais Güell est bien plus qu’un simple bâtiment. C’est une création magistrale de l’architecte visionnaire Antoni Gaudí, commandée par son mécène, Eusebi Güell. Cette résidence, construite entre 1886 et 1890, symbolise l’apogée de l’art moderniste catalan.

Avant d’explorer les merveilles de chaque étage du Palais Güell, il est important de souligner l’ingéniosité et l’innovation qui caractérisent son intérieur. Les salons richement décorés, les plafonds voûtés élaborés et l’utilisation novatrice de la lumière naturelle et de l’espace créent une atmosphère envoûtante, où chaque détail semble être pensé avec soin par Gaudí lui-même.

De plus, le Palais Güell est doté de fonctionnalités révolutionnaires pour son époque. Des rampes permettent aux cavaliers d’accéder directement aux écuries situées au sommet du bâtiment, offrant ainsi à Güell un accès pratique à la chapelle sans avoir à quitter son cheval.

Malgré sa conception originale pour servir de résidence familiale, le Palais Güell a été rapidement transformé en un lieu de réception pour des événements sociaux. Cependant, cette évolution n’a en rien diminué son importance architecturale. Au contraire, elle en a fait un exemple remarquable de l’adaptabilité de l’œuvre de Gaudí aux besoins changeants de la société.

En 1984, le Palais Güell a été officiellement inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, consacrant ainsi son importance architecturale exceptionnelle. Aujourd’hui, il reste l’une des destinations touristiques les plus prisées de Barcelone, attirant des visiteurs du monde entier pour découvrir la magie de l’art et de l’architecture moderniste catalane.


Un billet bien moins cher que les autres chefs-d’œuvre modernistes

Avant d’entrer dans l’antre du génie, on s’acquitte du droit d’entrée :
12 € plein tarif, 9 € tarif réduit, gratuit pour les moins de 10 ans (tarifs 2025).

Quand on sait que la Casa Batlló demande 35 € et la Casa Milà (Pedrera) autour de 28 €, on se dit que cette visite est presque cadeau au vu de ce que l’on s’apprête à découvrir. Car oui, le Palau Güell est une expérience complète, verticale, énigmatique, parfois solennelle, mais toujours surprenante.


La façade

En arrivant rue Nou de la Rambla, on pourrait presque passer devant sans le remarquer.
Le Palau Güell ne cherche pas à éblouir, du moins pas tout de suite. Sa façade en pierre grise de Garraf est monumentale mais discrète, symétrique, presque militaire. Deux immenses portails paraboliques en fer forgé, aux motifs floraux stylisés, encadraient l’entrée des calèches.
Un balcon central, d’une grande élégance, vient aérer l’ensemble, surmonté de l’aigle héraldique de la famille Güell.
La sobriété extérieure contraste fortement avec la richesse intérieure — et c’est bien là toute la stratégie de Gaudí.


Le hall d’entrée

Dès qu’on passe les grandes portes, on change de monde.

Le hall d’entrée est vaste, rythmé par des colonnes, des arcs en pierre, des sols en mosaïque, et une rampe qui descend vers les écuries ou monte vers les salons.

Ce n’est pas qu’un lieu de passage, c’est un espace scénique, où Gaudí orchestre l’arrivée des invités. Les domestiques, eux, empruntaient des circulations séparées, invisibles. Tout ici est fluidité, organisation, mise en scène. Une maison conçue comme une machine à habiter, avec un souffle mystique en prime.


Le Sous-sol

Descendons vers les écuries, et c’est là que le choc visuel opère.
Gaudí transforme un espace utilitaire en cathédrale souterraine : colonnes inclinées, voûtes croisées, brique nue. L’ensemble évoque une forêt pétrifiée, à la fois fonctionnelle et magique.
Chaque box est pensé, aéré, organisé. Une rampe hélicoïdale permet aux chevaux de descendre sans effort.
Même ici, la lumière est présente, filtrée par des ouvertures rondes. Ce n’est pas un simple rez-de-chaussée technique : c’est u den monde souterrain vivant, un hommage à la matière brute et au génie pratique.


La cour intérieure des écuries – un puits de lumière et de souffle

En sortant des écuries, après avoir contourné les stalles voûtées et les colonnes torsadées qui accueillaient les chevaux de la famille Güell, j’arrive dans une cour intérieure verticale, étroite, mais ouverte sur plusieurs étages.

C’est un puits de lumière et d’air, creusé dans la masse sombre du palais. En levant la tête, je vois les murs s’élever tout autour de moi, et les ouvertures s’étager jusqu’au sommet, laissant filtrer la lumière naturelle jusqu’au sous-sol.
Gaudí l’avait bien compris : sans cette cour, les écuries auraient été étouffantes, humides, invivables. Il crée donc ce vide stratégique, qui aère, éclaire, relie.

Mais ce n’est pas qu’une astuce fonctionnelle. Tout est soigné ici : les pavés sont bien disposés, les grilles en fer forgé élégamment dessinées, et les angles sont adoucis.
Ce lieu qui aurait pu n’être qu’un espace utilitaire devient un poumon discret du palais, une respiration architecturale entre les pierres.


Le rez-de-chaussée

Remontons au rez-de-chaussée : ici se trouvent les bureaux, la loge du portier, les salles de service, et l’entrée des invités officiels.
C’est un étage de transition, entre l’espace utilitaire et les salons nobles. Les matériaux deviennent plus riches, les volumes s’ouvrent, les perspectives se jouent de nous.


Une échappée discrète vers la cour intérieure

Alors que je déambule encore au rez-de-chaussée du Palau Güell, entre pierres sombres, colonnes massives et portes sculptées, un passage plus étroit m’intrigue.
Je m’approche. Et là, surprise : une ouverture vers l’extérieur, une petite cour intérieure postérieure, enclavée, presque secrète.

Ce n’est pas un jardin d’apparat, ni une cour lumineuse comme celles des palais andalous. C’est une cour de service, pensée pour ventiler, éclairer, relier discrètement certaines pièces techniques. Et pourtant, elle respire.
J’y découvre une façade arrière méconnue, sans l’austérité imposante de la façade principale. Ici, les ouvertures sont régulières, des balcons en fer forgé ponctuent les étages, et les volumes se déploient avec plus de souplesse, plus d’humanité.

En levant les yeux, j’aperçois la forme conique de la coupole centrale, qui semble émerger du cœur du bâtiment comme une montagne intérieure.
Gaudí avait pensé à tout : même cet espace fonctionnel, invisible depuis la rue, participe à l’équilibre respiratoire du palais.


L’escalier

Au fond du hall, se dresse l’escalier principal, magistral, encastré dans une alcôve voûtée et baigné d’une lumière tamisée. Construit en marbre, il semble sorti d’un monastère gothique : sobre, puissant, monumental.
Mais en y regardant de plus près, on perçoit les détails typiquement gaudiniens : des volutes de fer forgé dans la rampe, des jeux d’ombres produits par les lanternes suspendues, et surtout cette sensation de montée solennelle vers le monde noble du premier étage.

Ce n’est pas un escalier banal : c’est une transition symbolique, un passage du monde terrestre vers le monde de la culture, de la réception, de l’apparat.
Gaudí le traite comme un axe rituel, presque sacré. Le mouvement qu’il impose est lent, respectueux, à la manière d’un temple.


Le premier étage : cœur lumineux et vertical du palais

Après la majestueuse montée du grand escalier droit , je me retrouve sur un palier intermédiaire, niché sous une voûte de pierre, comme suspendu entre deux mondes.

La lumière y est tamisée, presque confidentielle. Ce n’est pas encore l’étage noble… mais je le sens : ça approche.

À droite, un second escalier plus court, en forme de demi-volée, me fait franchir les derniers mètres. Il est plus étroit, plus enveloppant, comme si Gaudí voulait ralentir l’ascension, ménager l’effet de surprise.

Lorsque j’émerge enfin sur le palier supérieur, je pénètre dans un espace plus chaleureux, habillé de bois sombres et de lumières obliques. Les plafonds deviennent plus travaillés, les matières plus raffinées.

Avant même d’atteindre la grande salle de réception, je découvre quelques pièces latérales, ouvertes ou discrètement dissimulées derrière des portes sculptées.

Les salons latéraux
L’un d’eux, sur la gauche, m’attire par son ambiance feutrée : un salon aux boiseries orientales, sans ostentation, mais où l’on sent que la conversation prenait place autour de fauteuils bas, de rideaux épais, d’un feu de cheminée.
Des vitraux filtrent une lumière colorée, comme dans un rêve mauresque.

Plus loin, un autre salon, plus clair, s’ouvre sur la cour intérieure. Ici, peut-être que les dames de la maison recevaient en petit comité, ou que les enfants jouaient loin du tumulte des grandes réceptions.

La salle à manger
Juste après, je découvre une salle à manger formelle, plus sobre, mais d’une élégance silencieuse. Une grande table occupe le centre, surmontée d’un lustre délicat.
Les murs sont habillés de bois foncé, les fenêtres encadrent la lumière de la cour, et une cheminée sculptée semble veiller sur les repas qui s’y tenaient autrefois.

Rien n’est clinquant. Tout est équilibre, justesse, fluidité.

Avant même de franchir les portes du salon central, on est déjà ailleurs : dans un monde de matières nobles, de pénombre soigneusement dosée, et de volumes qui dialoguent doucement les uns avec les autres.
Gaudí ne nous propulse pas dans le spectaculaire d’un seul coup : il nous y prépare, pas à pas, en construisant un chemin sensoriel.


La salle des pas perdus

Avant d’entrer dans le grand salon, je traverse une pièce enveloppée de bois sombre et de silence : la salle des pas perdus.

Ici, on attend. On écoute. On hésite. C’est une zone de suspension, comme une pause entre deux mondes : celui de la vie mondaine et celui du recueillement intérieur.
Même le sol semble vouloir retenir les pas, et le plafond, voûté comme une cathédrale miniature, invite à lever les yeux — avant de franchir le seuil de la splendeur

  • Elle n’est ni totalement privée, ni totalement publique : un entre-deux, comme le suggère son nom.
  • Son style est plus sobre que le salon, mais toujours élégant, avec :
    • Des murs en bois sombre,
    • Une lumière tamisée,
    • Des voûtes en ogive, typiques du style néogothique de Gaudí,
    • Et parfois des banquettes ou petits meubles intégrés, propices à l’attente ou à la discrétion.

Le salon central – Cœur lumineux et vertical du palais

Voici le véritable cœur du Palau Güell : un salon central monumental, qui s’élève sur trois niveaux, couronné par une coupole parabolique ajourée. Ce n’est pas un patio dans le sens classique du terme : c’est une nef verticale, une sorte de chapelle laïque, conçue pour éblouir les invités lors des grandes réceptions.

La coupole, percée de petits trous en forme d’étoiles et d’un oculus central, filtre la lumière naturelle qui tombe du sommet comme un faisceau céleste.
De nuit, des lanternes suspendues à la voûte recréaient l’illusion d’un ciel étoilé, renforçant la dimension mystique et théâtrale du lieu.

Tout autour, des galeries en encorbellement, des balcons privés, des moucharabiehs en bois permettaient à la famille Güell d’observer discrètement leurs invités.
Le sol, en marbre, reflétait la lumière, tandis que les murs jouaient avec les matières : bois sculpté, velours, fer forgé.
Un orgue majestueux (toujours visible) trônait sur la tribune, ajoutant une dimension sonore à ce décor éblouissant.

C’est ici que l’on ressent le mieux le souffle de Gaudí : une architecture qui dépasse la fonction pour atteindre le symbolique, le spirituel, presque le cosmique.


Je lève les yeux vers la galerie haute, au fond du salon central. Et là, presque caché dans l’ombre sculptée du bois, l’orgue du palais. Suspendu au-dessus de la foule, il ne se contente pas de jouer — il parle à l’architecture.
Ses notes, amplifiées par la coupole, montent en spirale, se diffusent comme de l’encens sonore. Gaudí n’a pas conçu ce palais seulement pour les yeux, mais aussi pour les oreilles et l’âme.

Construit à la fin du XIXe siècle pour Eusebi Güell, ce petit orgue à traction mécanique avait pour mission de remplir de musique les salons du pouvoir et de la culture. Son buffet, sobre mais puissant, s’intègre parfaitement dans le décor néogothique. On imagine les concerts privés, les cérémonies en petit comité, les moments où la musique émergeait comme une prière, flottant au-dessus des invités.

Aujourd’hui encore, après une restauration minutieuse, il peut résonner à nouveau. Bien qu’on ne puisse l’approcher, il veille depuis sa tribune, prêt à réveiller la mémoire sonore du lieu. C’est une présence muette, mais chargée de cette vibration que seule la musique sait laisser dans les murs.


Le deuxième étage

Ici, tout est plus sobre. Chambres, bureaux, petits salons… On sent que l’on quitte l’apparat pour entrer dans le quotidien bourgeois.
Mais la main de Gaudí est toujours là : plafonds complexes, jeu de lumière, poignées forgées, cheminées originales.
Même le banal devient forme d’art.


L’Attique

Le dernier étage était destiné aux domestiques, avec un accès direct à la terrasse. Plus simple, mais parfaitement intégré dans la logique du bâtiment.


La terrasse

Et voici le point final, le bouquet visuel, la signature de Gaudí :
Une terrasse peuplée de vingt cheminées, toutes différentes, recouvertes de mosaïques, de trencadís colorés, de formes hélicoïdales, coniques, fantastiques.
C’est comme si la maison s’épanouissait en fleurs géantes, comme si la matière voulait s’envoler.
On domine les toits de Barcelone, dans un silence étrange, presque sacré. C’est beau, fou, vivant.


Informations pratiques :

Le Palais Güell est ouvert au public tous les jours, à l’exception des jours fériés. Les heures d’ouverture varient selon la saison, je vous recommande de consulter le site officiel pour obtenir les informations les plus récentes. Les tarifs d’entrée sont abordables, avec des réductions disponibles pour les étudiants, les seniors et les groupes. Le palais est facilement accessible en transports en commun, situé à proximité de plusieurs stations de métro et d’arrêts de bus.

La visite se fait avec l’aide d’un audioguide (disponible dans plusieurs langues). L’audioguide est particulièrement utile parce qu’il y a tellement de détails dans chaque pièce que certains pourraient facilement passer inaperçus. Je ne m’y connais pas tant que ça en architecture, la visite a donc été hautement informative.

En conclusion le Palau Güell n’est pas le plus connu des édifices de Gaudí, mais il est sans doute l’un des plus cohérents, des plus profonds, des plus inspirés.
Un voyage vertical dans le temps, la lumière, la matière.
Et pour trois fois moins cher qu’un billet pour la Batlló ou la Milà.

Alors si vous passez par Barceloneévitez les files de touristes, poussez cette porte en pierre grise, et laissez-vous emporter dans un monde d’ombres, d’arches et de lumière