City breaks,  Urbex France

Rouen et la « Gare de triage » de Sotteville-lès-Rouen.

Lors de ma récente escapade à Rouen au cours d’un week-end en Normandie, l’émerveillement a été inévitable.

Dès l’arrivée à la gare SNCF Rive Droite, le charme opère. À peine sortis du train, nous mettons le cap vers l’un des plus beaux joyaux culturels de la ville : le Musée des Beaux-Arts. Bonne surprise pour les amateurs d’art : l’entrée aux collections permanentes est entièrement gratuite. Le musée abrite une collection remarquable, couvrant les grands mouvements artistiques du XVIe au XXIe siècle. On y découvre notamment de sublimes œuvres impressionnistes signées Monet, Renoir, Sisley… mais aussi des chefs-d’œuvre de Caravage, Véronèse, Rubens, Poussin, Delacroix, Modigliani ou encore Duchamp-Villon. Un voyage artistique à travers les siècles, d’une richesse étonnante.

En quittant le musée, nous poursuivons notre flânerie dans les rues piétonnes du centre-ville, bordées de maisons à pans de bois, jusqu’à rejoindre la rue Saint-Romain. Ici, chaque pavé semble porter l’empreinte du temps. L’atmosphère devient presque irréelle en approchant de la majestueuse cathédrale Notre-Dame de Rouen. Immortalisée par Monet dans une série de toiles fascinantes, elle trône au cœur de la ville comme une reine intemporelle. Classée primatiale, elle est le siège de l’archevêque de Normandie — et détient le titre de cathédrale la plus haute de France, grâce à sa flèche en fonte de 151 mètres, dressée fièrement au-dessus de la ville.


Cette cathédrale, profondément gothique, vibre d’histoire. Sa façade asymétrique, ses dentelles de pierre, sa tour-lanterne et son passé mouvementé (entre incendies, bombardements et restaurations) lui confèrent une aura unique. Elle est à la fois monumentale et humaine, imposante mais accessible, mystérieuse et familière.

Juste à côté, dans les murs de l’ancien archevêché, se niche un autre lieu chargé d’émotion : l’Historial Jeanne d’Arc. Ouvert le 20 mars, ce musée immersif retrace avec intensité le destin hors du commun de la Pucelle d’Orléans. Au fil d’un parcours scénarisé et interactif, on découvre l’histoire bouleversante de Jeanne : son enfance, ses combats, son procès, son exécution… mais aussi son incroyable postérité. Plus qu’un musée, c’est une expérience qui touche autant le cœur que l’esprit.

Après ce voyage dans les méandres de l’Histoire, notre exploration se poursuit à travers les ruelles animées de Rouen.


Rouen a ses secrets. Certains se cachent dans ses ruelles pavées, d’autres dans l’ombre de ses églises, et puis il y a ceux qui trônent en plein centre-ville, sans jamais passer inaperçus. C’est le cas du Gros-Horloge. Mais attention, ne l’appelez pas la Grosse-Horloge — ici, on vous regardera de travers. Pourquoi ce masculin surprenant ? Voilà une énigme que même les Rouennais aiment encore se poser.

Avec la cathédrale et la place du Vieux-Marché, le Gros-Horloge est un pilier de l’identité rouennaise. Installé sur l’une des artères les plus fréquentées de la ville, il relie le passé au présent comme il relie la place du Vieux-Marché à celle de la cathédrale. Mais pour vraiment le découvrir, il faut lever les yeux… ou mieux encore, pousser la porte.

L’aventure commence par un escalier en colimaçon, taillé dans la pierre. Étroit, presque secret. C’est à l’arrière du pavillon Renaissance, discret en façade, que se cache la tour du beffroi, souvent méconnue des passants qui se contentent de lever les yeux vers l’horloge.

À mesure que l’on grimpe les sept niveaux de cette tour médiévale, le tumulte de la rue s’efface.

Le silence s’installe, épais, presque solennel. On devine peu à peu l’âme de ce monument : un gardien du temps, tapi dans l’ombre. Et puis soudain, la lumière : à 43 mètres de haut, un panorama grandiose sur Rouen vous cueille comme une bouffée d’air frais. Toits d’ardoise, flèches gothiques, boucles de la Seine… Le passé et le présent se mêlent dans un tableau vivant.

Le Gros-Horloge intrigue aussi par sa simplicité déroutante : une seule aiguille sur chaque face. Pas de minutes, encore moins de secondes. Juste l’heure, marquée par un mouton doré, patte tendue vers l’instant. Détail curieux ? Pas tant que ça. Car ici, le temps n’est pas une course. Il se vit au rythme des marées, visibles jusqu’à Rouen grâce à un globe lunaire intégré au-dessus du cadran. Une référence directe à l’histoire portuaire de la ville.

Alors, pourquoi ce nom au masculin ? Certains disent que c’est pour insister sur la puissance du monument : une arche, un beffroi, et une horloge astronomique à la fois. Autant dire un symbole fort, bien plus qu’une simple pendule. Et puis il y a son mécanisme — l’un des plus anciens de France — toujours visible aujourd’hui, qui fait du Gros-Horloge un monument vivant, une machine à remonter le temps.

À midi, chaque jour, une divinité représentant le jour de la semaine apparaît sur un petit char de triomphe, discrètement, sous le chiffre VI. Un clin d’œil céleste pour rythmer les journées. Regardez bien aussi les motifs sculptés : des moutons, rappel de l’industrie lainière florissante de Rouen ; un agneau pascal au centre de l’arche, véritable emblème de la ville ; et, juste en dessous, une fontaine Louis XV illustrant l’amour entre Alphée et Aréthuse. Mythologie, artisanat, foi et industrie : tout s’entrelace ici.

Envie d’aller plus loin ? La visite guidée du monument vous ouvre les portes du pavillon et du beffroi. Vous y découvrirez la salle des cadrans, les premières cloches municipales, le mécanisme vieux de plusieurs siècles, et bien sûr, cette vue à couper le souffle sur la ville. Un moment suspendu, comme si Rouen vous murmurait ses secrets à l’oreille.

Le Gros-Horloge n’est pas seulement une icône architecturale. C’est une rencontre, une expérience, une immersion dans le temps. Et peut-être, une belle leçon : parfois, pour comprendre une ville, il suffit d’écouter battre son cœur… même s’il n’a qu’une aiguille.

Après avoir découvert les mystères du Gros-Horloge, notre promenade nous a naturellement guidés vers d’autres lieux chargés d’histoire. En descendant doucement la rue du Gros-Horloge, nos pas nous ont menés jusqu’à la place de la Pucelle. Petite et discrète, elle semble presque se cacher derrière les façades médiévales, comme si elle protégeait encore les secrets du passé.

Autrefois théâtre d’exécutions, la place a connu bien des vies. Aujourd’hui, elle charme par son ambiance paisible, ses terrasses accueillantes et ses maisons à colombages qui semblent figées dans le temps. Les détails architecturaux racontent à eux seuls des siècles de transformations. Le regard glisse sur les poutres sculptées, les encorbellements, les enseignes anciennes… Une atmosphère feutrée, hors du tumulte, presque intime.

Mais l’Histoire, la grande, ne tarde jamais à refaire surface à Rouen. Quelques rues plus loin, c’est la Place du Vieux-Marché qui s’ouvre devant nous, puissante et bouleversante.

C’est ici, en plein cœur de la ville, que Jeanne d’Arc fut brûlée vive en 1431.

Et même si le lieu est aujourd’hui très animé, entre marchés, restaurants et promeneurs, une certaine solennité y plane encore. Le contraste est saisissant : les maisons à pans de bois, colorées et joyeusement biscornues, bordent la place avec une allure de carte postale, tandis qu’en son centre se dresse l’étonnante église Sainte-Jeanne d’Arc.

Avec son architecture moderne et audacieuse, presque marine, l’église détonne. Sa toiture en forme de coque renversée, ses vitraux flamboyants récupérés de l’ancienne église Saint-Vincent détruite pendant la guerre, et la croix monumentale marquant l’emplacement du bûcher… tout ici est symbole. Symbole de mémoire, de renouveau, de résilience.

On entre, presque à pas feutrés. L’intérieur baigne dans une lumière chaude, filtrée par des vitraux du XVIe siècle. Le contraste entre l’extérieur contemporain et l’atmosphère sacrée du lieu est saisissant. Un moment suspendu, encore.

Après une pause déjeuner bien méritée, nous avons rejoint en quelques minutes les quais de la Seine, offrant une perspective captivante sur son architecture industrielle. Entre les hangars réhabilités en salle de sport, les restaurants, les cafés, les bateaux de croisière et les péniches naviguant sur la Seine, notre périple nous a conduit vers la célèbre gare de triage de Sotteville-lès-Rouen.

La scène qui s’est dévoilée était saisissante.

Des centaines de locomotives alignées sur plusieurs voies ferrées, chacune représentant une époque distincte. Au bout des lignes, la nature reprenait ses droits, offrant une image intrigante de symétrie entre l’industrie ferroviaire et la végétation envahissante.

Ces locomotives, vieilles de plusieurs décennies et chargées d’amiante, témoignent du passage du temps par des fuites variées. La dégradation s’accompagne d’un pillage incessant, avec des vols de cuivre et la récupération de transformateurs, provoquant de nouvelles fuites. Ces lignes infinies de vieux trains attendent patiemment leur dernier voyage vers un site de démantèlement, le plus proche étant à Grémonville.

Au cœur du site de Sotteville, sur ses 25 voies ferrées dédiées au stockage des vieux trains, se trouvent des trésors variés, témoignant de différentes époques. Des voitures Corail aux locomotives en passant par des TGV, ce lieu représente un véritable paradis pour les collectionneurs, même s’il demeure interdit d’accès.

Urbex Dépôt ferroviaire de Makkasan Bangkok

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