Pays Haute vallée de l'Aude

Un refuge frais au cœur de la canicule d’août 2003

Comus (Aude)

Quand l’été 2003 frappait la France avec sa canicule historique, un petit village perché dans l’Aude offrait un contraste saisissant. Bienvenue à Comus, à plus de 1200 mètres d’altitude, connu comme un vrai « trou à froid », où l’été reste frais, presque froid, et où la nature impose son calme.


Une échappée vers la fraîcheur

Août 2003 restera gravé dans les mémoires : la canicule la plus intense jamais enregistrée en France jusqu’à aujourd’hui.
Plus de 40°C dans les plaines, des nuits à plus de 28°C, la sécheresse généralisée, des milliers de morts, une sensation d’étouffement partout.

Face à cette fournaise, j’ai décidé de chercher la fraîcheur, de fuir la chaleur accablante. Pas vers les stations touristiques bondées, mais vers un lieu discret que l’on m’avait soufflé : Comus.
Ce village de montagne, presque invisible sur les cartes, perché au-dessus de Belcaire, avait la réputation d’être un « trou à froid ». On m’avait dit :

« Là-haut, même en août, tu mets un pull au petit-déjeuner. »


Trois jours dans un « trou à froid »

Jour 1 — L’arrivée et la découverte

La route qui mène à Comus serpente entre les forêts de sapins et les pâturages d’estive. L’air se fait plus sec, plus frais. En arrivant, le thermomètre affiche 23°C, un soulagement immédiat.
Le village, composé d’une vingtaine de maisons en pierre, d’une mairie modeste et d’un clocher discret, semble figé dans le temps. Pas de bruit, pas de touristes, juste le chant des oiseaux et le souffle du vent.

Je m’installe dans l’ancienne école qui sert aujourd’hui de « gîtes d’étape » pour accueillir les randonneurs et visiteurs en quête de calme. Le lieu est simple mais chaleureux, géré par la mairie et quelques bénévoles passionnés qui tiennent à préserver l’esprit authentique de Comus.

Le soir venu, je m’assois près de la fontaine publique. Le ciel s’illumine d’étoiles, l’air devient frais au point qu’un léger frisson me parcourt. En août. Un luxe rare.


Jour 2 — Sur les traces des Cathares et dans la fraîcheur des gorges

Je pars tôt ce matin-là, au lever du jour. Il fait à peine 12°C, et le vent léger me pousse sur le sentier. Je prends le GR107*, le célèbre chemin des Bonshommes, autrefois emprunté par les Cathares. À la sortie du village, le sentier descend progressivement, entre sapins et hêtres. Rapidement, la forêt s’épaissit, la lumière baisse, le silence devient presque total.

Direction : le hameau de Pélail, en Ariège, via les gorges de la Frau. En tout, près de 15 kilomètres aller-retour, soit environ 5 heures de marche. Le sentier est bien balisé, mais demande une bonne condition : près de 600 mètres de dénivelé cumulé et un point haut à 1 166 mètres. Rien d’insurmontable, mais il faut aimer marcher — et grimper un peu.

Heureusement, la quasi-totalité de la randonnée est à l’ombre. Un luxe rare en août, surtout cette année-là. Les gorges, profondes et étroites, offrent une fraîcheur presque irréelle. À certains passages, le vent froid s’engouffre entre les parois calcaires, glacial et saisissant même en plein été.

Sur 3 km de longueur, la rivière Hers a creusé dans la montagne de la Frau un véritable canyon de 300 à 400 métres de hauteur. Elles constituent une liaison naturelle entre Comus dans l’Aude et Fougax et Barrineuf dans l’Ariege. Étymologiquement, la Frau, signifie la fracture.

Pas un ruisseau, pas une fontaine sur le parcours : il faut impérativement emporter assez d’eau, surtout dans la montée au retour. Mais le spectacle naturel vaut chaque pas. Par endroits, les parois blanches se resserrent à quelques mètres, laissant passer un mince ruban de ciel bleu au-dessus des falaises. Les roches suintent, les lichens brillent, le chemin serpente à flanc de ravin. Une nature brute, presque sacrée.

Au bout du chemin, le hameau de Pélail se découvre comme un mirage. Un recoin oublié de l’Ariège, accessible uniquement à pied ou par une piste difficile. Là, je fais demi-tour. Une pause. Un fruit. Et je repars, le cœur léger.


*Le GR107, ou célèbre chemin des Bonshommes, relie Foix dans l’Ariège à Berga, en Espagne. Ce sentier d, environ 220km est chargé d’histoire, il fut emprunté par les derniers Cathares fuyant vers l’Aragon.


Jour 3 — Une envie de prolonger l’évasion

Je devais repartir, mais l’atmosphère me retient. Je pars marcher vers les pâturages au-dessus du village, j’y croise des troupeaux paisibles. Assis dans l’herbe, le silence est total.
De retour, une soupe chaude est servie à l’auberge locale. En août, oui, une soupe — et elle est bienvenue.


Pourquoi Comus est-il un « trou à froid » ?

  • Altitude élevée (1200 m) : permet des températures plus basses, surtout la nuit.
  • Topographie encaissée : favorise les inversions thermiques où l’air froid stagne dans les vallées et replats.
  • Exposition au vent froid du nord-ouest : rafraîchit l’air en permanence.
  • Absence d’effet d’îlot urbain : aucun surplus de chaleur artificielle.
  • Un microclimat montagnard, rare dans cette partie du Languedoc.