Artistes

Rendons visite à André Debru

Quand on parcourt le sud de la France, on croise parfois, au détour d’une route ou d’un vallon, les silhouettes de métal d’André Debru. Mais c’est sur les routes du Larzac et de l’Aveyron que sa faune accomplît sa grande transhumance immobile, telle une caravane figée de créatures familières et fantastiques, veillant silencieusement sur les voyageurs.


Nous quittons le gîte « Le sécadou » à proximité de la Notre-Dame-du-Désert direction le village des Costes-Gozons situé à une dizaine de kilomètres

Rendons visite à André Debru, ce génial ferronnier d’art qui semble avoir conclu un pacte secret avec le fer pour lui insuffler vie, mouvement et une irrésistible présence.


Il habite le village des Costes-Gozons, perché au cœur de l’Aveyron.


À première vue, un bourg paisible, de ceux où l’on s’attend davantage à croiser un troupeau de brebis qu’une créature échappée d’un film de science-fiction. Et pourtant…

Dans le susdit village où sévi notre artiste Forgeron Sculpteur, devant la mairie nous tombons nez à nez avec un cavalier de métal. Un colosse d’acier, l’air un peu Robocop, un peu chevalier futuriste, et suffisamment impressionnant pour qu’on hésite à lui adresser la parole.
De peur de quoi ?
De le voir s’animer ?
De déclencher un hologramme ?
De se faire verbaliser pour excès d’imagination ?


Qui sait. Finalement, nous prenons notre courage à deux mains, et le quidam de fer, très courtois dans son genre, nous indique d’une voix ferrailleuse que son père – « ferrailleur » de métier, entendez par là ferronnier d’art – possède un atelier à la sortie du village, et que nous devrions aller y jeter un œil sans hésiter.

Nous trouvons très vite l’antre de l’artiste, qui manie l’humour à différents degrés pour faire passer quelques messages. Comme celui bien senti « Doucement cabourd ! » signalée sur un faux radar de Gozon fabriqué à l’aide d’une machine à laver, ou encore cette « Miss éoliennes » sur son piédestal qui n’attend que le souffle d’Éole pour déployer ses ailes.

– le mot « cabourds » vient de l’occitan cap-bord, qui désigne aimablement les idiots distraits


A côté, un singe en train de se marteler la tête, une preuve éclatante que Debru maîtrise l’art de l’autodérision aussi bien que celui de la soudure.



Dans son atelier, les étincelles dansent comme des lucioles impatientes, et les silhouettes forgées prennent des airs de personnages échappés d’un conte de campagne.

Chez lui, même les outils ont l’air de sourire — sans doute parce qu’ils savent qu’ils participent à quelque chose de rare : transformer la rudesse du métal en poésie palpable.

Le ton est donné.

Rien de tel qu’une salve d’ironie pour rappeler qu’on entre sur un territoire où l’esprit joue autant que les mains.

André Debru nous accueille avec une cordialité immédiate. Un sourire lumineux, un accent rocailleux, le regard pétillant de ceux qui ont passé leur vie à donner une âme aux matières les plus têtues. Sans perdre une seconde, il nous entraîne à la découverte de ses œuvres dans son atelier.

Mais c’est sur le terrain qui jouxte son hangar que l’on comprend réellement la démesure réjouissante de son univers. Là, sous le ciel aveyronnais, s’alignent des dizaines de sculptures, plus étonnantes les unes que les autres. On pourrait croire à un musée d’art contemporain à ciel ouvert… si les musées avaient un peu plus d’audace et d’humour.


À première vue, ce bestiaire de métal a déjà fière allure, on y croise ainsi des héros familiers Astérix, Obélix et Idéfix, lucky luke, Mickey, Popeye, Tintin et Milou …


Au niveaux animaux, on est servie, éléphant qui sert de perchoir à deux échassiers, rhinocéros, bœuf à corne immense, girafe

📷 Photos avril et juin 2019


La vierge et le dragon de Gozon.
À environ 1,5 km du village, sur la RD 527 en direction de Broquiès, on peut découvrir les ruines du château de Gozon et la vierge installée sur l’ancien donjon.
La Vierge et le dragon de Gozon renvoient à une légende médiévale très ancienne, profondément ancrée dans l’histoire et l’imaginaire du Rouergue. André Debru a su y apposer son regard d’artiste et sa sensibilité de ferronnier, donnant au mythe une incarnation contemporaine où le métal, une fois encore, devient langage
La légende
Selon la tradition, un dragon – parfois décrit comme une créature monstrueuse vivant dans les environs de Gozon – terrorisait la population locale. Il ravageait les cultures, attaquait le bétail et semait la peur dans les villages alentour. Face à l’impuissance des hommes, les habitants se seraient tournés vers la Vierge Marie, invoquée comme ultime protection.
La légende raconte que, par son intercession, le dragon fut vaincu ou contraint de disparaître. La Vierge apparaît alors comme figure protectrice, triomphant du mal, symbole de la victoire du spirituel sur la force brute et du bien sur le chaos.


D’ailleurs, le territoire semble avoir adopté l’esprit de Debru : à quelques kilomètres du village, au hameau de Pinsac, un tyrannosaure de métal surveille fièrement la Nécropole wisigothe du Sabel où des sarcophages taillés directement dans le roc témoignent d’une occupation humaine des lieux qui s’échelonnerait du IVème au VIIIème siècle. Un voisinage pour le moins insolite entre art contemporain et histoire antique.

Les tombes du cimetière supérieur, en caisson ou en bâtière, remonteraient au IVe siècle, tandis que celles du cimetière inférieur, rupestres et creusées à même la roche, datent du VIIIe siècle.


Mais c’est en s’approchant que l’on s’amuse vraiment : chaque sculpture est un puzzle d’objets hétéroclites – outils oubliés, ressorts, boulons, anciens ustensiles ou pièces de machines agricoles – que l’artiste assemble avec une habileté déconcertante. Ce qui pourrait n’être qu’un amas de récupération devient, sous sa main, une œuvre expressive, drôle, parfois émouvante, toujours rustique et profondément vivante.

L’ensemble compose une sorte de royaume mécanique où la poésie surgit là où on ne l’attend pas. Un lieu où le réel et le farfelu cohabitent sans jamais s’excuser. Chez André Debru, le métal cesse d’être un matériau froid : il devient personnage, mémoire, geste, sourire.


Une visite qui ne laisse pas indifférent. On repart avec du bruit dans la tête, des étincelles dans les yeux, et l’impression d’avoir rencontré un artisan-artiste qui, dans son coin de l’Aveyron, forge bien plus que du fer : il forge un monde.


Attention : Après notre visite un chien aux mâchoires d’acier garderait l’entrée du hangar-atelier.


Autres œuvres de André Debru

Pendant des années, un éléphant monumental a dominé l’aire du Caylar. Il réside désormais à l’Espace Galerie des Noisetiers, en compagnie d’un rhinocéros et d’un ours, tous signés Debru.

👉 En savoir plus sur l’Espace Galerie des Noisetiers
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Le château de Saint-Izaire.
Le château est un imposant édifice quadrangulaire en pierre rouge qui abrite la mairie du village de Saint-Izaire. La structure est soutenue par un donjon dans l’aile sud (partiellement démoli depuis le XIXe siècle). Ce donjon renferme des fresques datant du XIVe siècle, et le plafond de la salle des évêques est de style baroque du XVIIe siècle.

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Sur l’aire du Larzac, Astérix Obélix et idefix accueillent depuis plus de dix ans les voyageurs affamés.

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À Saint-Affrique, une création inspirée par la liberté de Bartholdi et Gavroche qui rend hommage à Victor Hugo.

👉 Partons découvrir les deux œuvres d’André Debru a Saint Affrique


Le berger et ses brebis et le vendangeur

Tout comme le «berger et ses brebis» qui accueille les visiteurs sur le rond-point de Roquefort sur Soulzon (Aveyron) ou encore «le vendangeur de Magalas», non loin de Béziers (Herault), un hommage discret mais puissant au terroir viticole local
👉 Decouvrons le berger et ses brebis à Roquefort sur Soulzon
👉 Partons a la decouverte du vendangeur de Malagas


Et la galerie ne s’arrête pas là. À Saint-Paul-Trois-Châteaux, sur le rond-point d’entrée de ville, un chien truffier et son maître complètent cette exposition champêtre, clin d’œil aux traditions provençales et à l’art de vivre tricastin.

👉 Decouvrons l’article et les photos du Trufficulteur D’André Debru à Saint-Paul-Trois-Châteaux
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Le village de Salles-Curan.
Symboles de l’élevage aveyronnais sur le rond point a l’entrée du village route de Rodez, vaches, brebis et agneaux nous accueillent.

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La commune de Nant, en Lozère, dévoile encore les signes d’une prospérité passée. L’élégance du bâtiment qui abrite aujourd’hui la mairie en est un témoignage éclatant, tout comme la richesse harmonieuse de son patrimoine : l’abbatiale Saint-Pierre, l’église Saint-Jacques, la chapelle des Pénitents, la halle et le majestueux pont de la Prade qui enjambe la Dourbie avec assurance. Devant la mairie, un cavalier veille au grain : une œuvre d’André Debru, artiste inspiré qui donne une seconde vie aux pièces d’engins agricoles, transformant le métal rural en sentinelle poétique.

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Sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, à Bessuéjouls, juste avant Estaing sur la voie du Puy, le regard est attiré par une silhouette singulière. Dans le jardin de la mairie, à deux pas de l’église Saint-Pierre que l’on aperçoit en arrière-plan, se dresse un magnifique pèlerin de métal, façonné à partir de matériaux de récupération. Une figure à la fois humble et puissante, qui semble accompagner silencieusement les marcheurs dans leur longue traversée.

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Village de Melvieu.
A l’entrée du village de Melvieu, « Le Laboureur » a été installé, une sculpture en métal saisissante qui immortalise le geste quotidien du paysan, la houe en main et le regard concentré, comme pour rappeler aux passants la persévérance et la simplicité du travail de la terre.

👉 Partons à la découverte du village de Melvieu
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Saint-Sernin-sur-Rance (2023)
À Saint-Sernin-sur-Rance, sur la place de la Vierge, deux sculptures métalliques d’André Debru évoquent la mémoire du village : un cochon sur une bascule et, à ses côtés, un peseur. Un hommage sobre et malicieux à l’ancienne foire qui se tenait le 11 de chaque mois, lorsque le commerce du bétail animait la place.

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